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L’efficacité à la chinoise…
A travers le prisme de la pensée chinoise, François Jullien, philosophe et sinologue, professeur à l’université de Paris-Diderot, nous aide à repenser la notion d’efficacité – de l’entreprise notamment – d’une manière autre que celle qui a prévalu en Occident. L’efficacité y est plutôt basée sur la transformation de la situation par les ressources que l’on y trouve, qui permettront de rendre la situation favorable. L’Europe n’a plus l’hégémonie du sens; raviver le dialogue des cultures permet d’ouvrir l’éventail de l’humain ».
[Entretien réalisé par Dominique Huret – octobre 2011]
Ce que François Jullien dit est tellement raccord avec le mode de stratégie temporelle que nous préconisons que je ne résiste pas à en partager avec vous un extrait :
« Ce que la Chine nous apporte ce ne sont pas des leçons à emprunter et copier mais plutôt une réflexion sur nous-même pour envisager comment on peut penser l’efficacité autrement que selon la façon qui a prévalu en occident depuis les grecs. Nous avons appris l’efficacité sur un mode de modélisation et d’application: on fait un plan pour atteindre un certain but, puis on cherche les moyens de mettre en oeuvre ce plan, pour le faire entrer dans la réalité avec ce que cela implique de forçage pour imprimer ce plan, ce modèle, cet idéal, dans la matière résistante. C’est le schéma grec.
En Chine, on voit apparaître, dans les traités de stratégie chinoise notamment, une pensée de l’efficacité qui compte beaucoup plus sur la situation, qui détecte les ressources qui y seront favorables pour la faire mûrir et progressivement la transformer de façon a ce qu’elle devienne favorable. C’est la grande leçon de la stratégie chinoise !
Et aujourd’hui il parait important de croiser les deux, non pas renoncer à la conception du plan ou du modèle qui permet de mobiliser les personnes – car tout chef d’entreprise doit créer de l’idéal, donner du but, savoir vers quoi il va – mais en même temps il faut savoir aussi tirer parti de la situation, ou de ce que j’ai appelé en lisant les textes chinois, le potentiel de situation. Pensez que la situation n’est pas quelque chose qui résiste, elle peut être quelque chose qui aide. L’idée chinoise c’est qu’il faut infléchir la situation progressivement de façon à ce qu’elle devienne favorable.
« La grande idée chinoise est que
je n’engage le combat que quand j’ai déjà gagné. »
C’est à dire quand j’ai déjà le potentiel de la situation de mon côté ou que le différentiel entre l’adversaire et moi est tel, que l’adversaire s’en trouve décontenancé. Cette leçon chinoise est à méditer aujourd’hui… »
Et bien je crois que tout est dit !
A voir également…
« Orient, Occident, deux façons d’envisager l’efficacité » par François Jullien. [Colloque France-Chine 2007] >>> Modélisation à la grecque ou maturation à la chinoise…
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